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Pour
fêter ses huit ans la boite à chansons de
la rue sainte Catherine à Montréal, Le
patriote, dévoile en janvier 1973 son programme. Figurent à l'affiche : Raymond
Levesque, Jacqueline Dulac, Véronique Sanson, Hugues Aufray. Barbara
restera sur la scène de la rue sainte Catherine du 5 au 19 février.
Au cours de son séjour québecois
sortira à Montréal le film Franz le 16 février.
La
veille de la première au Patriote, par un communiqué de presse la
direction de la salle annonce l’annulation des concerts de Barbara.
Avant
de retrouver Montréal, Barbara effectuait une tournée en URSS du 18
au 26 janvier la menant de Moscou à Leningrad. Mais au retour de
cette tournée, une cheville foulée la contraint à l’immobilité.
Elle propose alors de revenir en avril. Cela s’avère impossible.
La programmation de la salle ne possède aucune disponibilité.
Barbara
reprendra sa tournée après sa convalescence par un spectacle le 1
mars au Palais des fêtes à Strasbourg.
Depuis
le 29 janvier Sol ou Marc Favreau (1929-2004) triomphe sur la scène
du Patriote dans son numéro de clown clochard.
" Si
tous les poètes voulaient se donner la main, ils toucheraient enfin
des doigts d'auteur !"
" La
vanille appartient à ceux qui se lèvent tôt; il faudrait écrire
ça tous les soirs dans son cornet."
" Si
vous donnez à un pirate de l'air, faut pas vous attendre à ce
qu'il vous rende la pareille !"
"J'assomme
mes responsabilités."
"À force de se faire traiter de
vagabond à rien... "
" Je
m'égalomane à moi-même... !"
" Les
photographes font tout un plat de leurs lentilles, et ensuite ils
courent travailler au noir. Ça n'impressionne personne !"
A
la suite du forfait de Barbara, à partir du 10 février Sol la
remplacera jusqu’au 25 février. Chaque soir ses aphorismes amusent
le public.
Après
les vacances estivales, le 12 septembre, le Patriote présente à la
presse sa programmation jusqu’en décembre. Finalement, Barbara
retrouvera la boite à chansons du 29 octobre au 11 novembre. Elle
succédera à Marie-Claire et Richard Seguin et Louise Forestier y
chantera après son passage.
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A l’automne 1973, Barbara
s’envole pour le Québec. Pour cette tournée, Roland Romanelli son
homme orchestre l’accompagne.
Après
une arrivée à Montréal, ils prennent la direction du nord à plus
de quatre cents kilomètres de capitale provinciale pour Chicoutimi.
Pour
une soirée, elle s’installe à l’auditorium Dufour du CEGEP de
Chicoutimi (534 rue Jacques Cartier Est).
Cette
salle accueille des chanteurs depuis le temps de l’ancien séminaire
de la ville. Au début des années 70, des travaux permettent la
rénovation du lieu et devient l’auditorium Dufour pour recevoir
970 spectateurs. Une ceinture d’arches en béton entoure les
locaux. En 2000 la salle ferme ses portes pour renaître en 2013 sous
le nom de Théâtre Banque Nationale, en 2022 l’auditorium devient
Théâtre de Chicoutimi. Au long de son existence ce lieu reçut
entre autres : Léo Ferré, Nana Mouskouri, Savatore Adamo,
Véronique Sanson, Jacques Brel, Dalida, Charles Aznavour, Les
compagnons de la chanson,Gilbert Bécaud, Juliette Gréco, Tino
Rossi…
Au
cours de l’après midi du samedi 27 octobre, Barbara s’installe
sur la scène. Elle répète avec Roland Romanelli, assiste au
réglage des lumières, place son piano.
Puis
à 20 h 30 le spectacle commence présenté par les Productions
Pierre Jobin.
Mais
ce soir, les spectateurs remplissent une petite moitié de la salle.
Barbara
entre en scène dans une tenue sombre un peu informe. Elle lance au
public : C’est insensé cette tenue. Si vous trouvez une robe
de velours noir à la recherche d’une chanteuse myope, c’est la
robe que j’ai perdue…
Au
cours du trajet depuis Montréal la valise contenant sa robe de scène
a pris le chemin des écoliers.
Elle
constate les places vides : "La dernière fois que je suis venue,
il y avait une tempête de neige, les gens ne sont pas venus et cette
fois il y a les élections…"
En
effet lundi 29 octobre se déroule l’élection des députés du
Québec.
Malgré
tout elle entame la soirée par Chapeau bas en ouverture, A chaque
fois, Amours incestueuses, L’indien, Quand ceux qui vont,
Perlimpinpin, Le mal de vivre, Veuve de guerre, Y’aura du monde, A
mourir pour mourir, Nantes, Le soleil noir, Drouot, Mon enfance, La
solitude, Hop-là avec en introduction l’histoire de la petite
Marie-Thérèse qui voulait devenir sœur. Elle chante aussi
Marienbad. Elle vient d’enregistrer ce titre qui se retrouvera sur
le 33 tours La Louve à paraître bientôt en France. Mais elle Ne
chante pas l’aigle noir.
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La tournée se poursuit en partant
deux cents kilomètres au sud pour une soirée au Grand Théâtre de
Québec.
En
1971, les autorités locales inaugurent le Grand
Théâtre de Québec.
Le bâtiment affiche le béton autant à l’extérieur qu’à
l’intérieur. A bas de trois des cotés de l’édifice coure un
monumental bas relief sculpté par Jordi Bonet (1932-1979). Une
phrase du poète Claude Péloquin s’inscrit dans ce bas
relief : Vous
êtes pas écœurés de mourir, bande de caves ! C'est assez !.
Le
grand Théâtre abrite deux salles : Salle
Louis Fréchette (1839-1908,
écrivain homme politique québécois) 1885 places et la
salle Octave Crémazie (1827-1879, poète libraire
québécois) 510 places.De
2018 à 2020, des plaques de verres recouvriront les murs extérieurs
dont le béton se désagrégeait.La
scène du Grand
Théâtre de Québec reçut
entre autres : Enrico Macias, Charles Aznavour, Frida Boccara,
Joe Dassin, Michel Sardou, Georges Moustaki, Michel Delpech, Dalida,
Véronique Sanson,
Michel Fugain….
La
station de radio CHRC produit le spectacle qui commence dimanche 28
octobre à 20 h 30 devant une salle comble.
Barbara
retrouvera le grand théâtre de Québec lors de la tournée suivante
en 1975.
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Les élections générales se
déroulent lundi 29/10/1973. Les Québécois élisent leurs députés
du Québec. Avec un Taux de participation élevé de 80,38 %,
les électeurs se passionnent pour ce scrutin. Le vote reconduit le
premier ministre du Parti libéral du Québec Robert Bourassa
(1933-1996).
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Du 30 octobre au 11 novembre,
Barbara retrouve Le Patriote chaque soir à 21 h avec un jour de
relâche le lundi. Yvan Dufresne produit les spectacles.
Yvan
Dufresne (1930-2016) fonda l’industrie musicale québécoise. Il
occupa le poste de président de firmes de disques APEX, Jupiter,
Discotel de 1958 à 1993.
Puis
il produit des artistes de la nouvelle génération tels que Ginette
Reno, Pierre Lalonde…
Il
fonde Le Fonds de recherche pour l’étude sur le SIDA Québec
(FRESQ)
Lundi
après midi, jour d’élections, Barbara s’installe sur la scène
du Patriote. Elle cherche la place du piano, vérifie les éclairages,
la sonorisation. En même temps elle reçoit les journalistes.
Les
journalistes assistent aux échanges entre Barbara et l’équipe du
Patriote :
Mais,
enfin, mon petit Denis allumez-moi les projecteurs…
Mon visage
n’est pas beau mais enfin il faut l’éclairer…
C’est
invraisemblable, personne n’est là pour m’aider. Appelez-moi
Yves Blais au téléphone. S’il ne corrige pas la situation
immédiatement, je prends le premier avion pour Paris…
Oui oui,
c’est le soir des élections mais demain, si je ne réussis pas mon
entrée, les journalistes ne mettront pas en faute le parti
québécois…
C’est invraisemblable, à la fin. Ensuite on dira
que je suis désagréable. Mais il y a de quoi. Comment peut-on
répéter dans de telles conditions ?…
Lors
de sa dernière venue au Patriote, Barbara enrageait contre le piano.
Pour la convaincre de venir cette fois Yves Blais et Percival
Blommfield achetèrent un nouveau piano.
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Mardi
30
octobre,
Barbara participe
à Appelez-moi
Lise émission télévisée
de Radio Canada diffusée
de
23 h à 23 h 30.Lise
Payette anime le
programme avec Jacques Fauteux, Jean Bissonnette le réalise. Le
chanteur français Christian
Delagrange et
Claude Landré (imitateur,
humoriste québécois)
animateur radio télé
figurent aussi au générique.
Barbara retrouvera Lise Payette dans son émission en 1975.
Dans
les studios de télé avant l’enregistrement de Appelez-moi Lise,
Barbara reçoit à nouveau les journalistes. Il retrouve une femme
souriante, calme. Un échange fluide s’engage.
"Je
vois mes amis quand je le veux..."
"Ce qui m’importe le plus au monde,
ce sont les gens..."
J’ai l’impression que, plus on vit repliée sur
soi, plus on peut donner...
"Le cinéma me passionne en tant que
spectatrice. Pas autrement. J’ai "accepté de faire ces deux films
(Franz et L’oiseau rare) parce que c’était des rôles qui me
plaisaient, mais j’ai refusé d’en faire beaucoup d’autres…"
Parlant de Madame : "Si la pièce de théâtre n’a pas marché
c’est pour beaucoup de raisons mais surtout parce que j’étais
très mauvaise..." "J’ai refusé des films après la sortie des
critiques de celui de Brialy parce qu’on a parlé de moi comme si
j’avais 20 ans de métier, en disant plein de belles choses. Je ne
pourrai jamais remettre le coup. On ne peut pas refaire les choses
qui ont été faites. Il faudrait que je sois mieux. Je ne crois pas
que cela soit possible…"
"Je ne me considère pas avant tout comme un
auteur mais comme une chanteuse. En 64, lorsque j’ai écrit ma
première chanson Chapeau bas c’est comme si quelqu’un d’autre
le faisait à ma place. J’ai toujours considéré que c’était un
moment de ma vie. Je ne sais pas si j’écrirai encore des chansons…"
Sur ses débuts dns la chanson : "Dans ces moments difficiles, je
m’enfermais chez moi, seule, profondément déprimée. Cependant je
n’ai rien lâché…."
"Cela a commencé à marcher le jour où j’ai
chanté des chansons qui parlaient de moi. Les chansons de Brel,
Brassens, Ferré, que j’interprétais alors, étaient des chansons
d’homme. Aujourd’hui, ce sont des chansons de femme…."
"François
Wertheimer est quelqu’un qui écrit pour moi, avec ma respiration,
des chansons qui me vont comme un gant. Il les fait mieux que moi…"
"Je suis toujours arrivée trop tard. Je suis née "retardée".
J’ai pu m’acheter mon premier piano en 1966 seulement. Avant, je
les louais. Je n’avais pas d’argent. Aujourd’hui j’en ai
trois. Ils sont noirs… J’ai appris à conduire à 37 ans. Je
viens de m’acheter ma première voiture, une Mercedes. Je fais du
cinéma depuis peu. Il n’y a pas très longtemps que je chante…"
Le
lendemain, à des kilomètres de là, outre océan, sort dans le
commerce le 33 tours La Louve.
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Lundi 5 novembre 1973, jour de
relâche au Patriote, L’émission télévisée Boubou reçoit
Barbara, présentée par Jacques Boulanger, réalisée par Raymonde
Boucher.
De
12 h 30 à 14 h 05, Jacques Boulanger invite aussi Renée Martel
(1947-2021) chanteuse québécoise, Madeleine Chartrand (chanteuse
actrice québécoise) et Pierre Labelle (1941-2000), humoriste,
animateur de radio membre du groupe Les Baronets (composé d’amis
d’enfance René Angelil (1942-2016) et Jean Beaulne) dans un décor
coloré aux couleurs lumineuses des années 70. |
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